Le sujet tabou de l’accident OKN 32.

Pour faire suite à l’article Des photos satellite de la catastrophe confidentielle OKN-32, voici quelques extraits d’une rare étude scientifique sur la question. Il s’agit d’une publication datant de 1995, intitulée « Historique de l’incident d’Okn 32, à la partie du nord du Sahara Algérien » (document PDF). Cette étude avait été réalisée par Saïd Akretche du Ministère de l’Energie et Lynda Okbi de la compagnie Sonatrach. Notons que l’un des deux auteurs, Saïd Akretche, a depuis accédé à de hautes responsabilités puisqu’il est actuellement le Président-directeur général de la société Naftal.

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Légende: Situation géologique avant l’effondrement d’octobre 1986. Image issue du document rédigé par S. Akretche et L. Okbi, et coloriée. 

Cette étude géologique d’il y a presque 20 ans détaille les raisons de l’effondrement dans le champ Berkaoui près de Ouargla. On y lit que « Le forage du puits Okn 32, en Février 1978, à mis accidentellement en contact
l’aquifère éruptif du Continental Intercalaire (Albo-Barrémien ) et celle du complexe
terminal (Sénonien carbonate). » Afin de simplifier la lecture sur ce blog, l’image a été éditée et coloriée. La nappe hydrique profonde (albienne) a été coloriée en bleu fonçé, la nappe superficielle est en bleu clair. L’éruption d’eau à travers la couche de sel (en gris) a généré une cavité située entre 450 et 600 m de profondeur. Les deux puits de pétrole OKN 32 et OKN 32 bis y sont schématisés. 

L’étude illustre l’effondrement de terrain qui s’est produit en octobre 1986.

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Légende: Situation géologique après l’effondrement d’octobre 1986. Image issue du document rédigé par S. Akretche et L. Okbi, et coloriée. 

En 1990, le débit de la montée de l’eau albienne avait été estimée entre 2500 et 2800
m3 par heure. Pour se représenter le volume d’eau en jeu, c’est la quantité qui aurait pu alimenter une ville d’environ 300000 habitants en eau potable!

 

Des recherches sismiques ont été effectuées pour estimer la taille de la cave créée par la dissolution de la couche de sel du fait de l’éruption d’eau.

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Légende: Schéma déduit des études de sismique. Image issue du document rédigé par S. Akretche et L. Okbi. 

D’après une étude réalisée par la société d’ingénierie Enageo en 1991, la cavité souterraine avait une extension maximale d’environ 740 m dans la direction nord-ouest/sud-est. Dans la direction sud-ouest/nord-est, l’extension était estimée à 570 m.

 

Pour ce qui est de la contamination de la nappe hydrique superficielle, les auteurs mentionnent qu’une première étude en 1987 avait « décelé la propagation de la contamination par les eaux salées suivant les quatre directions à partir d’OKN 32 et dont les limites se situent:
— vers l’est, à environ 3 km;
— vers le sud, à environ 2.5 km;
— vers le nord, à environ 1.5 km;
— vers l’ouest à environ 1 km. »

Les études ultérieures de même type avaient détectés une progression de la salinisation dans toutes les directions, sans que des données chiffrées aient été révélées.

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Légende: Tableau issu du document rédigé par S. Akretche et L. Okbi. Les dernières estimations, qui datent d’il y a 23 ans, mentionnaient une cavité d’un volume de 37 millions de m3, 71 millions de tonnes de sel dissous et une augmentation constante de la teneur en sel dans la saumure.

La publication de S. Akretche et L. Okbi se termine en préconisant certaines mesures comme le « colmatage définitif sur toute la hauteur de l’Albien et jusqu’au conduit Cénomanien-Turonien par l’injection d’un ciment qui bouchera définitivement Okn 32. » Cela a-t-il été fait depuis? On peut raisonnablement en douter.

Depuis près de 20 ans, une chape de plomb semble recouvrer ce sujet tabou. Devant l’impossibilité d’un débat public sur cette affaire OKN 32, voici à titre de vœux pieux quelques questions: Jusqu’où la contamination en sel s’est-elle propagée depuis? Des mesures ont-elles été entreprises pour remédier aux effets de l’accident? Cet accident peut-il se reproduire au niveau d’un autre puits pétrolier? Des mesures correctives immédiates en 1978 auraient-elles pu y remédier? Des responsabilités ont-elles été établies?

Des questions que les institutions officielles comme l’assemblée nationale, le sénat, le conseil économique et social n’oseront probablement pas poser. La pollution générée par l’exploitation pétrolière et gazière a-t-elle d’ailleurs jamais été abordée là dedans?

Sur cette affaire OKN 32, l’Etat algérien et la compagnie Sonatrach ont vite opté pour l’infantilisation et la mise à l’écart de l’opinion publique. Et en parallèle, sur l’affaire du gaz de schiste, ils parient depuis le début sur un essoufflement du mouvement de contestation.

Baki @7our Mansour

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Lire aussi:

Des photos satellite de la catastrophe confidentielle OKN-32.

Algérie: A la poursuite d’une nappe miraculeuse d’hydrocarbures dans le Nord.

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